C’est un géant qui nous a quittés, le 8 janvier dernier, à l’âge de 91 ans. À la tête de l’une des plus imposantes discographies de l’histoire, le ténor suédois a ébloui des générations de mélomanes par sa musicalité hors pair, la perfection de sa technique, la facilité de son aigu et la qualité de sa diction dans toutes les langues. Opéra Magazine, qui a déjà rendu hommage à Nicolai Gedda dans l’éditorial du précédent numéro, a demandé à Alain Lanceron, producteur des derniers enregistrements de l’artiste pour EMI France, d’évoquer sa mémoire de manière plus personnelle.
L’un des plus grands bonheurs de ma vie professionnelle est d’avoir eu l’opportunité de travailler avec nombre de héros de ma jeunesse de discophile. Avec Elisabeth Schwarzkopf ou Victoria de los Angeles sur des rééditions. Et avec Mstislav Rostropovitch, Yehudi Menuhin ou Nicolai Gedda pour les derniers enregistrements de leur carrière. Gedda faisait partie, avec Schwarzkopf et los Angeles justement, et bien entendu Callas, du quatuor vocal de rêve rassemblé par Walter Legge pour EMI, qui avait bercé mon enfance. Je l’ai ensuite découvert en concert aux Choregies d’Orange, pour le Requiem de Verdi, puis en scène dans les productions mythiques de l’ère Liebermann au Palais Garnier : Orphée et Eurydice, Faust, Les Contes d’Hoffmann – mais je garde aussi le souvenir ébloui d’une tardive Tosca à Nice. Et j’ai eu l’honneur de produire sept disques avec lui : des mélodies avec orchestre de Fauré, Ciboulette de Reynaldo Hahn, Padmâvatî de Roussel, Fra Diavolo d’Auber, les Évocations de Roussel, des mélodies de Satie et Œdipe d’Enesco.