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La Cenerentola au Palais Garnier : à voir ou revoir pour les chanteurs

07/12/2018

Palais Garnier, 1er décembre

Voici un spectacle qu’à sa création, en juin 2017, nous avions trouvé raté (voir O. M. n° 131 p. 64 de septembre), mais dont la reprise est plutôt une bonne surprise. Certes, le décor d’Éric Ruf est toujours aussi tristounet, et la mise en scène de Guillaume Gallienne demeure laborieuse, mais le tout fonctionne indéniablement mieux.

Succédant à Ottavio Dantone, Evelino Pido montre un solide métier. Mais si l’on se réjouit d’une mise en place plus rigoureuse qu’en 2017 et du choix de ne plus accompagner à la harpe tous les récitatifs, on regrette un soin insuffisant apporté aux couleurs et, plus encore, une absence d’esprit et de poésie, par-delà une incontestable énergie.

Le plateau, renouvelé à l’exception des deux sœurs chipies – les excellentes Chiara Skerath et Isabelle Druet –, est très supérieur. Seul l’Alidoro d’Adam Plachetka déçoit un peu : malgré sa haute stature et sa voix puissante, le baryton-basse tchèque ne fait pas grand-chose de son personnage.

Le contraire d’Alessandro Corbelli, acteur pince-sans-rire d’une rare finesse, pour qui Don Magnifico n’a plus aucun secret et dont les airs sont des leçons de naturel et d’autorité, tant pour l’émission haute et claire que pour un canto sillabato porté à un rare degré de perfection.

En prise de rôle, Florian Sempey impressionne en Dandini par sa voix mordante et sonore, et par cet aplomb musical et scénique – non dépourvu de cabotinage, cependant – qui ont déjà fait le succès de ses Figaro. Mais certaines vocalises manquent de netteté, et le chant syllabique est parfois heurté.

Lawrence Brownlee offre un Don Ramiro efficace, aux suraigus brillants. Mais son personnage, bien peu poétique, n’est jamais touchant. Tout le contraire de Marianne Crebassa, d’une crédibilité physique absolue, silhouette dont la fragilité contraste avec la robustesse d’un timbre rare et profond, à la vibration si personnelle et immédiatement porteuse d’émotion.

On admire, en particulier, sa virtuosité à toute épreuve, qui lui permet de faire fleurir les coloratures comme autant de bouquets de roses… Sauf dans le rondo final, où la voix achoppe soudain sur la justesse de certains traits, et lance des la et des si un peu blancs ou crispés.

S’agissant des débuts de la mezzo française en Angelina/Cenerentola, on peut légitimement espérer que la fréquentation du rôle lui permettra de dompter les difficultés de cet air, pour en devenir une remarquable titulaire.

THIERRY GUYENNE

Représentations jusqu’au 26 décembre.

PHOTOS : Adam Plachetka, Marianne Crebassa, Alessandro Corbelli, Florian Sempey et Lawrence Brownlee. © OPÉRA NATIONAL DE PARIS/ÉMILIE BROUCHON

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