Comptes rendus Lisette Oropesa brillante mozartienne
Comptes rendus

Lisette Oropesa brillante mozartienne

24/11/2021

1 SACD Pentatone PTC 5186 885

« Mozart a toujours été mon compositeur favori. » Dès la première ligne du texte d’introduction au livret de cet album, gravé en studio, en août 2020, Lisette Oropesa affiche ses préférences.

Sans surprise, elle consacre ce qui, sauf erreur, est son premier récital, au musicien qu’elle a découvert quand elle était jeune flûtiste et travaillait ses Concertos. Avec raison, la soprano américaine établit un parallèle entre l’écriture des parties solistes de ceux-ci et celle des Airs de concert : même exigence de contrôle du souffle, de la dynamique, avec, en plus, le souci d’une juste expression des sentiments, et ce en quelques minutes seulement.

Elles sont effectivement redoutables, ces pages destinées à de grandes cantatrices (Aloysia Weber, Louise Villeneuve, Josepha Duschek…), qu’on a souvent comparées à des opéras en miniature – certaines, comme « Ah, lo previdi », sont construites sur des contrastes d’une redoutable efficacité. Au-delà de la virtuosité, elles dessinent une « carte du tendre » dont la profonde humanité séduit les cœurs les plus endurcis. D’où, pour l’interprète, la nécessité de toujours trouver l’expression la plus juste.

La voix, lumineuse et pleine, de Lisette Oropesa est fièrement projetée. Le registre grave est suffisant, même si on l’aimerait plus étoffé. L’extrême aigu a également tendance à s’amincir, mais l’ensemble demeure homogène.

La ligne est rigoureuse, habitée (« Chi sà, chi sà, qual sia »), avec ce qu’il faut de fébrilité et de frémissement (« Vado, ma dove ? ») ; et l’interprète traduit bien l’urgence des récitatifs (« A Berenice » , « Ah, lo previdi »), soulignant ainsi leur importance dramatique, sans jamais se départir d’une élégance et d’une noblesse de ton qui leur donnent leur force.

La virtuosité est au rendez-vous, sans être ostentatoire (« Ah ! se in ciel, benigne stelle », avec ses vocalises et ses notes piquées), et le théâtre vient tout naturellement de la musique, sans sollicitation incongrue du texte ou de la partition. Cet équilibre permanent, essentiel chez Mozart, n’est pas toujours facile à obtenir, de même que l’alliance entre rigueur et liberté.

Il Pomo d’Oro confirme, si besoin était, qu’il compte parmi les meilleures formations du moment. Dirigé avec dynamisme par Antonello Manacorda, il contribue à faire de ce florilège mozartien une « carte de visite » qui retient l’attention, alors que Lisette Oropesa semble se tourner aujourd’hui vers Bellini, Donizetti et Verdi – à l’exception d’une Konstanze dans Die Entführung aus dem Serail, à Vienne, en mars 2022, avec le même chef.

MICHEL PAROUTY

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