Comptes rendus Les Lombards conquièrent Monte-Carlo
Comptes rendus

Les Lombards conquièrent Monte-Carlo

14/04/2021

Salle Garnier, 25 mars

Une nouvelle production, signée Hugo de Ana, aurait dû remplacer, à Parme, en septembre dernier, celle du regretté Lamberto Puggelli, qu’on connaissait déjà grâce à un DVD, publié par Cmajor (voir O. M. n° 91 p. 74 de janvier 2014), et qui marque aujourd’hui son âge – elle date de 2003. Moins par sa conception même (hors la citation incongrue, trois fois répétée, de Guernica) que par son usure, malgré quelques bons moments, et sa direction d’acteurs minimum (reprise assurée par Grazia Pulvirenti).

Pour autant, c’était une bonne occasion de faire entrer I Lombardi au répertoire de l’Opéra de Monte-Carlo – une œuvre rarissime, créée à la Scala de Milan, en 1843, et qui reste sous-estimée dans la carrière de Verdi. Daniele Callegari rend pleine justice à son héroïsme conquérant, à la tête des forces de la maison : un orchestre flamboyant (remarquable performance du premier violon, David Lefèvre, pour le long solo de haute virtuosité du III) et des chœurs superlatifs, préparés par Stefano Visconti.

Nino Machaidze brille dans tout ce qui évoque le soprano spinto chez Giselda, avec un registre par ailleurs parfaitement homogène, où l’on apprécie, avant tout, le beau métal du médium. Sans faute dans les aigus et le vertigineux finale du II, elle s’impose plus dans la souplesse du duo « Oh belle, a questa misera » que dans le « Salve Maria ! » du I, accueilli poliment, sans plus.

Très concentrée, au point d’afficher une expression trop uniment renfrognée, la soprano géorgienne impressionne par sa maîtrise, faisant regretter que l’actrice ne recoure qu’à une poignée de gestes stéréotypés.

À ses côtés, s’impose d’abord l’Arvino, d’une éclatante jeunesse, du ténor italien Antonio Coriano, frère improbable du Pagano bien âgé de Michele Pertusi, qui ne peut dissimuler la sensible fatigue du timbre. Mais le chanteur a dans le rôle de longues lettres de noblesse, qui font encore merveille pour la beauté du phrasé, comme pour l’intelligence du personnage, bien en situation, émouvant même sous ses habits d’ermite.

Faisant nettement pâlir, sur ce plan, l’Oronte du ténor mexicain Arturo Chacon-Cruz, qui affiche toujours, lui, son timbre chaleureux, mais très insuffisamment nuancé, et trop peu consistant. On préfèrera le Pirro du baryton-basse italien Daniel Giulianini, au premier rang des comprimari : bon Acciano, Viclinda honorable, mais Sofia trémulante, et tout de même en retrait.

Une salle fournie, dans les limites de la jauge, qui fait excellent accueil à l’ensemble, rappelle, une fois de plus, qu’il y a un abîme entre le streaming et la présence d’un vrai public, complément indispensable de l’œuvre qui lui est destinée.

FRANÇOIS LEHEL

PHOTO © OMC/ÉRIC DERVAUX

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